Trouble dans l'humanisme. Colonialité, corps et accumulation initiale (Marisol De la Cadena, Aníbal Quijano, Michel Foucault)

Résumé 

À partir de suggestions philosophiques glanées dans le travail anthropologique de Marisol de la Cadena, cette thèse noue la critique de l’humanisme par Michel Foucault à celle de la colonialité élaborée par Aníbal Quijano. Je déplie cette proposition en trois parties. La première nous plonge dans le travail ethnographique que Marisol de la Cadena mène dans les Andes péruviennes. L’autrice suggère une approche de la critique foucaldienne de l’humanisme dans Les mots et les choses à l’aune d’une analyse du pouvoir colonial européen à partir du 16e siècle. De la Cadena fait alors appel à la notion quijanienne de « colonialité du pouvoir », que je présente en m’intéressant à la façon dont Quijano a abordé la question de l’humanisme. La seconde partie de la thèse aborde la critique foucaldienne de l’humanisme dans Les mots et les choses ainsi que dans Surveiller et punir. À partir des éléments recueillis chez Quijano et chez Foucault, j’avance que la critique de l’humanisme et celle de la colonialité se rencontrent autour du problème marxiste de l’accumulation initiale. Ma thèse soutient que lire Quijano et Foucault ensemble permet de s’écarter des lectures classiques de cette question (qui l’envisagent généralement en termes purement sociaux et économiques). La trame qui émerge de la lecture croisée de ces deux auteurs fait apparaitre l’accumulation initiale comme un outil. Ce dernier rend visible la façon dont les rapports de pouvoir capitalistes et coloniaux façonnent les corps (humains et autres) selon un dualisme entre nature et humanité. La thèse s’ouvre alors sur une exploration d’approches non dualistes des corps et de leurs puissances génératrices de possibilités de mondes moins dévastés.

Jury de la soutenance : Madame Vinciane Despret (Présidente, ULiège), Madame Florence Caeymaex (Secrétaire), Monsieur Edouard Delruelle (Promoteur), Madame Jules Falquet (Professeure, Université Paris 8), Monsieur Eduardo Viveiros de Castro (Professeur, Université fédérale de Rio de Janeiro)

_{Illustration : Cordillère des Andes ©}Laura Aristizabal Arango